dimanche 29 décembre 2024

LaRoy


La dernière image ? Probablement la scène d'introduction énigmatique qui expose l'esprit profond de LaRoy mêlant codes du film noir à la sauce Coen Brothers (on pense souvent à Fargo, No country for old men, voir The Big Lebowski pour le duo de pieds nickelés), humour potache et personnages bien écrits, souvent attachants. D'ailleurs cette scène culmine avec ce qui a été conservé pour l'affiche du film et qui est 100% Blood Simpliste !

Probablement que de rebondissements il y a un peu trop, possible que l'héritage des Frères Coen est réclamé de façon trop insistante (les parallèles et citations sont parfois des coutures trop visibles) mais pour un premier film il faut surtout saluer la maîtrise de la mise en scène, la performance collective de tous les acteurs (une brochette de personnages sensationnels), l'écriture avec une narration aux petits oignons qui réserve son lot de surprises et de vraies sensations fortes. Et puis surtout ce duo qu'on n'oublie pas facilement. Dans la vraie vie des perdants subissant les évènements et qui cette fois parviennent par la magie du 7ème art à inverser d'une certaine façon la vapeur et à en tirer avantage. Premier presque coup de Maître pour ce Shane Atkinson à suivre assurément ! 

mardi 24 décembre 2024

La vie est belle. Capra

 

La dernière image ? Ce sera toujours et à jamais ce pont enneigé, les eaux sombres dessous, la silhouette déguingandée de James Stewart arpentant l'artère principale de Bedford Falls.

La vie est belle que je viens de revoir un 24 au soir en famille garde une force peu commune, arrache des larmes quand vient le moment pour Bailey de découvrir le monde tel qu'il vient quand il n'existe plus... C'est déchirant. Alors, j'ai bien relevé quelques longueurs, des dialogues superflus, c'est certain mais le fond, cette dualité Bailey / Potter (Retour vers le futur avec le recul reprend beaucoup beaucoup de choses au merveilleux film de Capra), tout le message sur cet homme de "devoir" qui à trop avoir aidé les autres aura fini par s'oublier est toujours aussi pertinent, fait mouche tant il fait réfléchir. On a tous connu ces gens au tempérament trop sacrificiel et qui finissent par s'effacer.... Un conte fantastique dans tous les sens du terme.  

lundi 23 décembre 2024

Green room


La dernière image ? Un moment étrange, drôle, suspendu où le héros, dos à l'adversité mais pas à son destion, qu'on a pensé perdu à tout jamais pour le film lors du massacre initial de son avant-bras, donne à voir qu'il s'est rasé la tête, s'est peinturluré le visage pour désacraliser, se donner du courage. Il en laisse pantois les 2 arrivants armés... Seule la compère et nous le spectateur sommes alors en capacité de piger le délire.   

Malin petit film d'horreur et habile huis-clos qui n'est pas dénué d'un humour toujours bienvenu et qui sait par ailleurs faire exister des personnages arrivant avec leurs doutes, une fragilité (certains tueurs un peu tendres) une humanité qui transparaît souvent ("je préfère aller en taule..." dira l'un des assaillants sous emprise du redoutable grand architecte de l'horreur) et qui finitpar rendre ce petit film attachant, comme ses deux héros de circonstances qui finiront même par discourir sur le fameux album qu'on emporterait sur une île déserte... De la série B finement troussée, de très bonne facture.

dimanche 22 décembre 2024

M Klein

 

La dernière image ? Le Vel d'Hiv, cette longue séquence qui glisse imperceptiblement de la ville, de la rue vers l'atmosphère carcérale d'un train de marchandises, ou de transport de bêtes. Ce qui renvoie parfaitement à la séquence inaugurale où l'on scrute dans les traits et maxillaires d'une femme le signe, la preuve indubitable de sa judaïté qui la condamnerait de fait.

La grande force de ce film est avant tout sa matière sombre et presque fantastique, son atmosphère puissamment Kafkaïenne (on pense au Procès, ou à Invitation au supplice de Nabokov). sa radiographie du double, et d'une forme de folie qui en découle chez le personnage principal, avec l'obsession qu'il se cheville au corps pour cet autre moi, son humanité perdue, celui qu'il aurait pu être ou devenir... Une idée fixe qui l'amène à fréquenter les mêmes lieux, à séduire les mêmes personnages, adopter le même chien, embarquer dans le même train de la mort.... Le film aurait d'ailleurs pu s'intituler Le deuxième homme tant on peut penser parfois au grand film de Carol Reed.         

Décidément Joseph Losey est un très très grand réalisateur. Il me rappelle ici Roman Polanski à ses plus grandes heures. Quant à Delon, avec le recul, je me demande s'il ne tient pas là son plus grand rôle. Magnifique, flambeur, vénal, retors puis fragile, touchant, curieux, obsessionnel et pour finir fou à lier !

Conversation secrète

 


La dernière image ? La scène emblématique de cette filtature sur une place étendue et par définition difficile à circonscrire / étalonner / "quadriller" pour une écoute dès lors que les personnages principaux se déplacent et que des animations se donnent jour ici ou là. Une gageure...

Toute la force de Conversation secrète réside dans l'apparente simplicité de son dispositif filmique. Un héros plutôt taiseux sombre, marqué dans le passé par des filatures ayant coûté la vie d'innocents interroge le sens profond de son métier, de sa mission à l'heure où il pressent avoir avec cette mise sur écoute livré 2 oies blanches au vengeur qui peut y voir une occasion rêvée pour zigouiller à tour de bras... Mais est-ce aussi simple qu'il n'y paraît ? Ces échanges en apparence anodins sont-ils codés, dissimulent-ils des enjeux plus retors ? Plus on les écoute puis les ré-écoute, plus on finit par douter, y trouver ici une fragilité, là une détermination, un sous-texte... 

C'est tout l'intérêt de ce grand film qui s'inscrit élégamment dans la mouvance des Blow Up et autres Blow Out ! La musique est tout bonnement fantastique, colle parfaitement à cette atmosphère poisseuse et paranoïaque où la technologie toute puissante renforce paradoxalement tous les personnages dans des solitudes prostrées. La préfiguration en majesté de la période actuelle qui consacre l'inidividu interconnecté mais jamais aussi perdu, replié.        

A noter des seconds rôles épatants dont le regretté John Cazale ou le surprenant Harrison Ford dans un rôle fort ambigu. Et je retiens pour finir que Gene Hackman est un acteur particulièrement fantastique ici, chez Arthur Penn (son fantastique Night Moves) ou William Friedkin (Popeye dans French Connexion). Quasiment son trio gagnant. On pourra chercher aussi du côté de L'Épouvantail (Jerry Schatzberg) , Impitoyable (Clint Eastwood) ou Prime Cut (Michael Ritchie).


vendredi 13 décembre 2024

When evil lurks

 

La dernière image ? Elle est multiple tant de moments terrifiants reviennent en mémoire. Pour tout dire, ça faisait longtemps que j'espérais voir se déchaîner une telle puissance dévastatrice à l'écran. De la terreur à l'état pur.

Par un propos subversif (notamment sur la famille, ici plus du tout un refuge), le réalisateur franchit ostensiblement toutes les lignes rouges, met en scène l'inpensable (la scène du chien pour ne prendre que cet exemple) et laisse exsangue, aussi désespéré que le personnage principal.

Certes, il y a des défauts, des répétitions malvenues, des moments trop explicatifs, mais l'incroyable audace de ce réalisateur (à suivre assurément) parvient preque à faire oublier ces défauts (d'écriture essentiellement) parfois gênants mais jamais rédhibitoires.

Je ne sais pas si ces références sont bien celles du réalisateur mais on pense et pas qu'un fois à des films comme l'Au-delà (Lucio Fulci) ou les Révoltés de l'an 2000 (de Narciso Ibanez Serrador. Je pense à la scène de lynchage dans l'école).

Pour celles et ceux qui le verront, attachez vos ceintures !


samedi 2 novembre 2024

Saw X


La dernière image ? Franchement aucune... Tout ici est réchauffé, recyclé... Il y manque un coeur pour battre et faire vibrer.

Quand Saw est sorti en 2004, j'étais déjà abasourdi par la nullité crasse d'un projet sans colonne vertébrale et ressuçant gaiement les Seven et autres Cube en visant surenchère, provoc, mauvais goût et hémoglobine à gogo. Je n'en avais plus vu un seul jusqu'à ce Saw X... Qui vient confirmer s'il était besoin que la nullité a résisté aux années... Quel énorme navet. A vomir !  

vendredi 1 novembre 2024

Late night with the devil


La dernière image ? Je retiendrai le concept de départ, L'immersion par des images d'archives de cette émission qui entend faire le buzz, des années qu'on a aimé. Un petit écran qui fascinait tout autant qu'il interrogeait déjà.

Sorti de cette entrée en matière, encore un petit film d'horreur au concept malin, à l'idée de départ pas inintéressante : qu'est-on prêt à faire dans les seventies pour gagner la bataille de l'audimat ? Mais la veine Blair Witch se ressent trop et surtout le film accouche d'un souris... Tout est banalement répétitif (le magicien sceptique qui se refuse à croire à l'impensable pendant que le drame vécu dans le passé par le présentateur revient évidemment frapper aux portes...). Linéaire, scolaire, lourdingue, malgré des touches d'humour bienvenues dans la découverte de l'univers.

J'ai envie de dire qu'"une bonne idée" suffit rarement...           


samedi 19 octobre 2024

Mars Express

La dermière image ? J'adore ce moment suspendu où le robot cherche à sécher ses larmes mais en vain... Puissamment poétique. Probablement que je retiendrai aussi l'attentat sur un bout d'autoroute tranquille et la façon dont l'héroïne parle enfin d'égal à égal avec son copain de robot qui soudain s'est affranchi de ses maîtres, de ses liens, de ses chaînes... Un véritable duo émerge. Séquence puissante qui marque les esprits. 

Les (nombreuses) références affleurent et sont identifiables tout au long de Marx Express : l'affiche naturellement (Cobra), les pillules rouges, l'univers des hackers (Matrix), l'attaque de la tueuse ou la séquence du commissariat (Terminator 1 & 2), Carlos, sa vie d'avant, la séquence finale et le combat contre un robot nouvelle génération (Robocop). Le copain de régiment devenu traître (Le Privé d'Altman). Toute l'imagerie Film Noir insérée dans de la SF évidemment on voyage dans les effluves de Blade Runner. Et puis le clin d'oeil final à 2001 A Space Odyssey.

Perso, j'apprécie que Mars Express cite ses glorieux aînés. Des références peut-être un peu trop lisibles parfois. Je regrette aussi quelques bavardages inutiles et décryptages rappelant parfois la résolution d'un épisode de Scoobidoo. Mais ceci étant cet univers est crédible, souvent inventif. on est pris et curieux jusqu'à la résolution finale. Le duo fonctionne, les dialogues et les choix artistiques et de mise en scène font souvent mouche. J'ai cependant une réserve : toute la chorégraphie des combats de la fin m'ont un peu déçu. La visée trop grandiose/grandoliquente de la résolution est une autre petite déception. J'aurais sincèrement préféré que cette idée reste une fausse piste et qu'on soit revenu sur une problématique beaucoup plus personnelle/intime... Ce dénouement place finalement le film davantage dans une veine James Bondesque ou Mission Impossiblesque (avec de super méchants à mettre hors d'état de nuire) que dans ce que le Film Noir a créé de plus beau, de plus vénéneux... Le final désespéré du Privé pour ne prendre que cet exemple...

Mais sinon c'est honnêtement un très bon film d'animation qui tranche avec le tout venant habituel. Et rien que ça on peut saluer !

dimanche 13 octobre 2024

Les Chambres rouges



La dernière image ? C'est ce fameux son strident qui surgit lorsqu'exclue brutalement de la salle du procès, l'héroïne obtient enfin un regard puis un geste énigmatique de l'accusé.

Séquence glaçante, mise en scène chirurgicale. D'ailleurs, c'est à retenir : Chambres Rouges (à l'instar de son accusé au physique d'abord quelconque) finit par exercer une emprise sur le spectateur à coups répétés de lents travelling étouffants qui jouent merveilleusement sur tous les registres du regard : celui qu'on vole, celui qui insiste, celui qui s'empêche, celui qui se dérobe, celui qui s'inonde de peur ou de tristesse... Cette approche parfois théâtrale, peut-être un peu rigide par moments, un peu distante, "intello" diront certains (ce que je peux comprendre dans les reproches exprimés) finit par servir le propos qui tout de même renouvelle le genre (enquête sur un serial killer et traque des preuves, on est à des années lumière du Silence des Agneaux pour ne prendre que cette référence) en créant ce trouble inquiétant sur les intentions de l'héroïne... Désaxée, sûrement, tueuse en puissance, on ne sait pas, elle cultive les rituels de la groupie "Copycat" et ne permet pas au spectateur que nous sommes de nous glisser sou le maquillage, derrière les lentilles pour radiographier via sa cornée veineuse les intentions profondes, premières. Des secrets si bien enfouis qui jusqu'au bout nous resteront inacessibles. Et cette question  demeure :  Où se situe le plaisir recherché au cours de cette élucidation ? Passionnant casse-tête.

Minimaliste, cuisine moléculaire du thriller horrifique, on peut donc rester sur sa faim par ici j'en conviens mais les quelques "flushs" sous le fard qui fusent font sacrément mouche et ont fini par emporter le morceau me concernant.

Reste une enquête dont on aurait peut-être aimé qu'elle soit plus complexe, davantage "manufacturée", à la sueur du front. Car la seule transpiration se produit ici sur du tapis d'appartement ou dans l'immaculée salle d'audience, au cours d'un interminable surplace. Le monde d'aujoud'hui en somme. Connecté partout mais ici. Et nulle part, qui sait ?

Et ça, renouveler un genre sans gesticuler, en bougeant à peine le petit doigt sur un clavier, en n'agitant que ses petits yeux rougis, c'est déjà un sacré tour de force.

Brillant !



mardi 8 octobre 2024

Armes Sensibles 2004

La dernière image ? Un tournage mémorable au petit jour. Une clairière, un saut dans le temps. Début des années 2000. Le temps file mais la pellicule imprime. Mieux, elle témoigne. Court-métrage fantastique d'un vieux copain.

Le temps file et nos âmes mélancoliques y sont toujours sensibles. Comme... l'arme toujours à l'oeil.  Et l'âme toujours à la bonne heure.


La planète des singes : Le nouveau royaume

 

La dernière image ? Probablement cette introduction délicieuse où l'on suit l'épreuve, le rite intiatique imposé à des jeunes singes sur le point de devenir adultes et qui doivent tutoyer les sommets pour dérober chacun son tour un oeuf de rapace. Un fameux. C'est bien filmé, on entre efficacement dans le film (malgré l'abus toujours malheureux d'effets spéciaux et d'autres fonds verts). 

Mais c'est vraiment tout ce qu'il y a à sauver. Par la suite, le personnage (ridicule et peu crédible) de la jeune femme qui suit les aventuriers, la horde de méchants singes, l'humain qui a survécu et vit aux crochets des "méchants", le finale orchestré sur un bord de mer où l'eau (on le sent venir) va constituer la menace principale pour l'équilibre déjà précaire de cette société tyrannique... Tout ici est faiblard, téléphoné et ne mérite pas le détour une seconde. Si ce n'est cette séquence d'intro plutôt bien troussée.

jeudi 3 octobre 2024

Furiosa

 

La dernière image ? Je retiens ce final illustrant le sort funeste réservé au méchant gesticulant du film. Belle image frappée du sceau d'un génie visuel que possède incontestablement George Miller.

Je ne suis pas forcément le "bon" spectateur parce que j'avais déjà à redire sur Mad Max Fury Road. Mais incontestablement celui-ci est encore en-dessous du précédent. Je crois surtout parce qu'en voulant multiplier les sous-intrigues (décupler l'adversité, faire émerger un nouveau méchant mais beaucoup trop bavard et inconsistant à mes yeux, ce qui toujours affaiblit un personnage couvant une telle ambition) le film s'étire et finit par "singer" le plus souvent les moments fortiches de Fury Road. Cela reste du grand spectacle parsemé de saillies visuelles impressionnantes mais la structure de la narration et le choix de certains persos tout comme une durée excessive m'ont vraiment laissé sur ma faim. Mais encore une fois, je ne fais probablement pas partie du panel rêvé étant resté marqué dans ma jeunesse par les 2 premiers Mad Max auxquels je garde toute mon admiration.


lundi 6 mai 2024

Roma

La dernière image ? J'ai adoré toute la parenthèse enchantée sur un bord de mer (le temps que "Papa" récupère ses affaires) parce que ça m'a sacrément parlé. Le parfum iodé de Grand Bassam est venu jusqu'à mes narines, a rayé ma mémoire, toute ma jeunesse s'est convoquée d'elle-même. Une histoire de famille aisée un peu comparable : Mexique ici, Côte d'Ivoire là, début des années 70 d'un côté, les années 80 de l'autre. En lieu et place de Cleo, il y avait François ou Ali. Mais c'est une autre histoire.

Ce qui me vient tout de suite pour dire ce que j'ai ressenti, c'est le mot "touchant". On sent une entreprise sincère, pleine d'une jeunesse et d'une époque révolues qui remontent par petites touches gracieuses et mélancoliques. On sent d 'ailleurs précisément cette envie de faire revivre des moments vécus, des odeurs, des lumières, des sons, des lieux, des matières, des fous rires... Entreprise Ô combien louable.     

C'est touchant, c'est souvent juste mais comme je viens de le dire (et c'set aussi une limite) cela reste une composition visuelle et sonore millimétrée de souvenirs qu'on veut ramener au premier plan sans en perdre la moindre miette. Et qui prend donc le risque de corseter l'émotion, de la contraindre, de l'empêcher d'émerger par une mise en scène obsessionnelle du moindre petit détail Le résultat, c'est en somme le premier film ASMR de l'histoire. Chaque goutte s'échappant d'un robinet, chaque coup de balai dans la courette, a son importance, n'est pas oubliée. C'est souvent sublime (on pense au style de Jerry Skolimowski pour sa maîtrise insolente des mouvements de caméras et du noir et blanc) mais on peut trouver cela froid, trop papier glacé voire distancié... 

Et ce sentiment est probablement renforcé par la faiblesse des enjeux,  de l'intrigue  : il manque quelque chose de fort notamment pour les personnages.... Les enfants restent cantonnés à un groupe indistinct, une fratrie informe. La mère est décrite à gros traits, sans grande aspérité (à part lorsqu'on la voit rentrer ivre une seule fois). Le père n'a jamais le droit à défendre son cas, à une deuxième chance d'apparaître à l'écran pour exister différemment. Et Cleo quant à elle reste également un mystère. Attachante, réservée, femme de devoir, son histoire, leur histoire reste après tout assez simplette.

Demeurent quelques moments forts comme cet accouchement, point d'orgue du film qui terrasse véritablement l'imagination tant on perçoit la douleur de Cleo. La plus belle séquence d'un film très attachant.

dimanche 5 mai 2024

Le diable tout le temps

 

La dernière image ? Finalement positive, levant enfin un certain espoir, où le personnage d'Arvin enfin bercé par le soubressauts de la voiture, se laisse aller à une douce rêverie imaginant comment tout se sera arrangé, comment chacun aura compris les raisons de ses crimes... On l'imagine en rémission avec un chien, une femme, un enfant et l'espace d'un instant, on devine que le Diable a enfin mis les voiles...

Sur les regrets, je n'ai guère goûté la construction du film qui pendant une heure et demi nous perd dans des tranches de vie successives (sur un plan géographique et temporel) en nous plongeant dans une certaine perplexité pour saisir les fins dernières d'un film bien sombre où ne nous est épargnée aucune ironie du sort, aucune bassesse humaine ordinaire... Je trouve d'ailleurs qu'il y aurait à redire sur cette répétition des assassinats de femmes innocentes (la mère de Lenora par exemple et même Lenora par la suite même s'il s'agit d'un suicide) par des hommes (parfois démoniaques, parfois dérangés, parfois simplement victimes de leurs coupables tourments, de leurs destins, d'une forme d'atavisme) qui se font punir ensuite à leur tour... Avec la récurrence appuyée de symboles religieux et d'une représentation omniprésente du  mal sous la forme du jugement dernier ou du destin qu'incarne par exemple ce couple de serial killers exécutant leur basse besogne dans la région et fauchant les vies comme on respire. Cette volonté de "hasards et coïncidences" (même si la voix off du narrateur contribue à la rendre crédible puisque quelqu'un quelque part est là pour en rendre compte) qui ne seraient que la traduction d'une volonté supérieure est pour le moins tirée par les cheveux... Que Roy puis Arvin se retrouvent tous deux pris en stop par les mêmes cinglés interroge, peut légitimement agacer.

Maintenant, je trouve que la deuxième partie (en gros à partir de l'arrivée du nouveau pasteur) est brillante et rachète les ratés de la longue entrée en matière. La reconstitution de cette époque (qui s'achève avec la maturation de la Beat Generation), d'un mode de vie dans cette petite région, le jeu des acteurs (tous assez extraordinaires), l'atmosphère et le souffle presque littéraire qui traverse le film grâce à la voix off sont véritablement à saluer.

Quand Arvin se fait "bras vengeur" et que l'épilogue apporte enfin un éclairage sur les différents blocs narratifs de l'histoire, qu'un lien naturel vient relier les uns aux autres jusqu'au point final (qui est aussi le point de départ) au pied de cette croix érigée par le père d'Arvin, alors je confesse m'être laissé finalement emporter par cette histoire sombre, terrible, mais qui je le disais en introduction, par cette fin allège les coeurs et laisse enfin entrer le filet de lumière propre à se remettre à rêver pour Arvin d'une vie heureuse. On se dit pour finir qu'il le mèrite.

mercredi 1 mai 2024

Paris Texas

La dernière image ? Harry Dean Stanton dos tourné au miroir sans tain qui raconte à Nastasia Kinski leur histoire. C'est tragique, c'est beau, ça vous arrache des larmes. La musique de Ry Cooder imprègne tout autant le film qui a quelque chose d'hypnotique, de lancinant, comme les échos lointains, les réverb' saturées de la gratte électrique.

Je ne le découvre qu'aujourd'hui et sincèrement rien ne ressemble plus à un film d'Aki Kaurismaki que ce Paris Texas la légèreté en moins. J'ai bien aimé même si malgré un final épatant, déchirant même, l'ensemble pèche à mon goût par trop de longueurs (l'insistance sur les errances, les flottements immobiles) et de dialogues explicatifs un peu sur-signifiants (tout ce que le frère explique au sujet d'Hunter qui est le fils de Travis et qu'ils ont élevé en son absence etc.). Mais Paris Texas reste un film emblématique d'une époque et assez envoûtant il faut bien reconnaître.

lundi 29 avril 2024

Rashomon


La dernière image ? Deux moments reviennent puissamment, qui sont d'ailleurs les deux faces d'une même pièce. J'ai d'un côté le déluge sous cette porte dont on ne sait s'il s'agit d'un bâtiment dont la construction a été interrompue ou d'un édifice achevé mais ayant subi les ravages de la guerre. De l'autre on est saisi par la chaleur érotique de cette journée d'été où l'on transpire, où l'on traque le moustique jusque dans les nuques, où l'on cherche de la fraîcheur, la douceur d'un petit somme sous un arbre. l'après, les conséquences de ses actes, l'enfant parfois.. Et l'avant bien sûr, le désir brûlant, l'irréparable parfois....
 
Rashomon est déjà à saluer pour sa construction brillante, moderne, étourdidssante, qui donne à comprendre que le regard et l'interprétation sont les choses les moins partagées du monde... des anti vérités. Chacun y voit toujours midi à sa porte... Se grandit ou se rabaisse selon ses propres objectifs. Ce kaléidoscope est éclairant sur les raisons toujours insondables qui amènent un drame malheureux, cruel, injuste à se produire. En cela, le film est un conte universel qui ne vieillit guère. 75 ans après, il fait mouche. C'est la marque des grandes oeuvres.

La mise en scène est d'une vivacité rare. Je pense à cette façon qu'a Kurosawa de capter la lumière qui faufile à travers les branchages. On se dit que Terence Malick (grand amateur du style) s'en est beaucoup inspiré.

Un bien grand film qui exploite le filon du genre, du crime pour captiver le spectateur et ne plus nous lâcher jusqu'à un dénouement qu'on n'est pas prêt non plus d'oublier. Ce bébé, la pluie qui cesse, l'espoir qui renaît... Un peu comme dans l épilogue de Pusher 2 de NWR.

samedi 27 avril 2024

True Grit

La dernière image ? Evidemment cette chevauchée nocturne suivie de l'épilogue qui laissent des traces indélébiles.

True Grit est un grand western porté par un trio formidable. John Wayne revit sous les traits du divin Jeff Bridges pendant que ce personnage de jeune fille rigide, déterminée, avec des valeurs, est inoubliable.

Peut-être que le coeur du film nous laisse un peu sur notre faim par son côté trop linéaire ou sage mais dès que l'emballement se fait sur les berges de cette rivière où la jeune fille se retrouve face-à-face avec l'assassin de son père, alors c'est du très grand art que les Frères Coen nous concoctent jusqu'au dénouement qui arrache plus qu'une larmichette. C'est d'ailleurs lors de cet épilogue que la voix off prend sa dimension puissamment lyrique. Presque littéraire. 

The Game

La dernière image ? J'aime le côté "enfin fendue l'armure" lorsque l'émotion remonte (au gré des images de video amateur de l'époque) à mesure que nou suivons la chute du héros de la toute fin.

Mais j'avais pas aimé du tout lors de sa sortie. Parce qu'évidemment on ne peut s'empêcher de se dire "Tout ça pour ça ? ". Je viens de le revoir. Mon avis a quelque peu changé. D'abord parce que la maîtrise de Ficher est à saluer, le rythme, le suspense, cette ambiance paranoïaque, schyzophrène, qui t'amène à penser même lors de ce denier plan que le jeu n'est peut-être pas encore tout à fait fini... C'est ce que j'aime finalement, ce côté jusqu'auboutiste vers l'absurdie, cette idée qu'une fois dans le jeu (dans le film), on peut se perdre entre fiction et réalité. Où commence l'une, où finit l'autre ? Cette dimension bien restituée est plutôt séduisante (plus que dans mes souvenirs en tout cas).

En revanche, je maintiens que The Game reste un film très mineur pour tout ce qu'il contient de pas crédible une demi-seconde et qui bris eforcément le charme... La folie n'exclue pas un minimum de vraisemblance pour pouvoir s'identifier. Tout ce qui est développé par la fameuse société (malgré toutes les précautions du monde on l'imagine) dépend de tellement de facteurs, peut si facilement comme dans la vraie vie provoquer des drames et des morts accidentelles (dans la préciciptation au volant d'une voiture, un arrêt cardiaque lorsque la voiture plonge dans l'Hudson, une malhereuse arme qu'on croyait chargée à blanc etc etc...) dans un monde aseptisé, peureux comme c'est pas permis, où tout se judiciarise pour un oui pour un non, qu'on ne peut décemment pas marcher dans la combine et accepter l'hypothèse que tout ceci ait été possible... Surtout dans la perspective d'un stratagème déployé avec finalement de "bonnes" intentions pour faire émerger l'humanité chez le héros... Sacrément ampoulé si l'on y réfléchit un instant. Alors oui on revient toujours à la même question : tout ça pour ça ?     

vendredi 26 avril 2024

Pulp Fiction

La dernière image ? Le final sympathique, positif et pour lequel pour une fois le style "bavard" de Tarantino sert vraiment le propos car il est utile à faire émerger la moralité légère, lorgnant du côté d'une forme de rédemption positive et gaie de Pulp Fiction.

Mais c'est aussi là que le bât blesse. Un film que je n'avais d'ailleurs guère adoré à l'époque, dont il ne reste finalement pas grand chose à part peut-être une BOF sympa. Tout ici est trop frivole, dans l'air du temps, oubliable et donc de nature à vieillir prématurément... Ca se confirme en le revoyant. "Il a pris cher" comme on dit !

S'agissant de la structure, j'avais gardé le souvenir d'une architecture solide, habile, pensée...En fait elle n'est pas si complexe et sophistiquée que ça, elle est même plutôt basique. Le segment d'entrée et de sortie (qui se répondent) restant pour moi le plus intéressant, le plus cinégénique. Mais sinon et même si Bruce Willis dégage toujours un truc très fort à l'écran sans avoir besoin d'ouvrir la bouche, son histoire n'inspire vraiment pas grand chose, on ne croit pas à son histoire d'amour et les hasards successifs qui le font tomber nez à nez avec le perso de Johh Travolta puis avec le grand méchant milliardaire (parti faire ses courses lui même à pied à l'épicerie du coin wtf) sont objectivement faiblards, provenant d'idées objectivement paressseuses. Toute la partie entre la nana du pseudo "parrain" et le perso de John Travolta idem est aussi longue qu'elle est tristement dénuée de tout intérêt. Toujours provoc et chic et toc, s'achevant sur la malheureuse overdose. Et pire encore toute la séquence nettoyage de voiture après la bévue d'un des 2 tueurs à gages...

Bon et franchement, globalement, un film truffé d'effets choc, de tics adolescents, symptomatique de ces années 90, avec des persos caricaturaux au possible et pour lesquels on ne ressent rien à part peut-être (je le disais plus haut) pour le jeune couple de braqueurs et le perso de Samuel L Jackson qui en s'humanisant in fine nous permet enfin de compatir et d'entrer dans le film mais c'est beaucoup trop tard... 

mardi 23 avril 2024

Le Stratège

La dernière image ? Les images d'archives qui défilent lors de la fameuse vingtième victoire historique. Très émouvant.

Mais le mieux dans ce film c'est encore le fameux bouquin Moneyball qu'il faut lire pour les amoureux de Football Manager dont je fus dans la jeunesse...

Car le film est assez plan plan, académique, monocorde, n'attachant que peu d'intérêt aux personnages, aux joueurs recrutés à vil prix... Quel dommage que tout soit centré sur Brad Pitt qui lui-même est beaucoup trop transparent.

Reste que cet esprit Moneyball qui irrigue de très loin le film vaut quand même le détour... Cette idée qu'en allant au-delà des apparences, au-delà des intuitions, on peut juger du potentiel des joueurs (comme des salariés d'une entreprise) pas sur leur bagoût, leurs silhouettes ou leurs styles respectifs mais sur des résultats concrets, de vraies réalisations...

On imagine alors bien qu'en Ligue 1 on pourrait aller repêcher des joueurs écartés des écoles de formation parce que "ingérables", trop petits, trop grands, trop fragiles, aimant trop la vie...  Et monter avec une équipe de feu.

Mais je comprends aussi toutes celles et tous ceux qui trouvent dans ce BIG DATA spirit l'ombre malfaisante du capitalisme à tout crin...

Donc voilà pour finir. Un film bien trop lisse pour une idée forte qui méritait bien mieux. Bien plus.

samedi 20 avril 2024

Killers of the flower moon


 La dermière image ? Probablement la séquence nocturne juste après le dynamitage de la maison de la soeur de Molly. Belle atmosphère crépusculaire. Presque fantastique. Qui reste en mémoire. D'ailleurs les scènes de flammes dans la nuit m'ont rappelé la beauté  irradiante des Moissons du ciel (Malick).

Ca fait quelques films que je m'acharne à répéter que le Scorsese qu'on a aimé n'est plus là et que ça ne date pas d'hier. La caméra tourne mais d'âme, d'émotion vraie, vous ne trouverez pas. 

D'abord quel intérêt d'étirer un film sur près de 3 heures ? Surtout quand le rythme est aussi monocorde, le style aussi académique, l'intrigue aussi plate... Je veux dire que tout ce qu'on voit rapidement ne fait que se répéter inlassablement jusqu'à l'épilogue. Aucune surprise. Tout est donné d'entrée. "On va tous les spolier via des arnaques à l'assurance, à l'héritage avec de crapuleux empoisonnements et assassinats à la clé". Voilà le programme. Maintenant on va vous dérouler le programme pendant plus de 3 heures. Indigestion quand tu nous tiens...

Le seul piquant résidait peut-être dans l'ambiguité du personnage campé par Di Caprio et sa relation (sincère ?) avec Molly. Mais c'est trop peu et surtout jamais développé. Tellement peu développé qu'on ne ressent rien quand ils perdent leur fille (???). Repensons simplement ici à la douleur ressentie lorsque le personnage campé par Ryan O'Neal dans Barry Lindon perd son fils... Ici pas plus d'émotion pour la fille que les soeurs de Molly, sa mère, ou même la longue maladie (provoquée) de Molly... Le film anesthésie patiemment son spectateur.  

Ce qu'on peut bien sauver de façon certaine dans Killers of the flower moon, c'est son titre bien sûr, beau comme c'est pas permis, mais aussi et surtout  le devoir de mémoire qu'il légitime. Mais sorti de l'intention, il me semble clair qu'en pareil projet il eut fallu mener l'intrigue du point de vue de l'enquêteur du FBI (personnage ici secondaire et probablement beaucoup plus intéressant à suivre y compris dans ses motivations et devoirs). Dévoiler ainsi l'horreur au fil de son enquête. Un peu comme Alan Parker le fit dans Mississipi Burning (sur une thématique pas si éloignée). Je crois que cela aurait permis au spectateur de découvrir progressivement la machination diabolique en commençant par les apparences d'un monde où la cordialité et la cohabitation entre les communautés semble toujours à première vue harmonieuse... 

Le problème ici est de toute façon multiple. J'ai parlé de cette intrigue qui déroule son programme sans aucune aspérité, de façon lisible et prévisible. Bêtement linéaire. Les acteurs sont par ailleurs en cause. Ils en font 100 fois trop. Je pense surtout à Di Caprio (pourtant génial, peut-être le meilleur de sa génération) qui cabotine à outrance, singeant le plus souvent le Brando du Parrain et sa bouche pleine de je ne sais quoi... Ayant toujours le sourcil froncé, le regard soucieux avec ce côté chien battu "je souffre, je suis tiraillé, j'aime Molly mais j'aime mon oncle, je participe à des trucs horribles mais il faut le faire, je suis un homme de devoir"... De Niro n'est pas en reste. Mais pour une raison simple. Les personnages sont monolithiques. L'un obsédé par l'argent est un pourri sans la moindre étincelle d'humanité jusqu'au bout. L'autre est un lâche, amoureux mais perdu et qui se laisse facilement manipuler. Il n'ouvre les yeux que lorsqu'il est finalement pris la main dans le sac... Tous deux sont énervants au possible. La durée y est pour quelque chose évidemment. Impossible de s'attacher. Comme il est impossible de s'attacher à Molly et sa mollesse de tous les instants. Qui ne finit par en vouloir à son mari non pas pour son implication directe dans la mort de sa mère, de ses soeurs et de son ex mari mais seulement après le procès quand elle comprend que l'insuline n'était pas son seul remède quotidien... Pauvre petite oie blanche. Quelle zénitude ! Un somnifère à elle toute seule. Et dans sa communauté, personne pour s'indigner, la défendre, se rebiffer ?   

Voilà donc comme d'hab j'ai envie de dire (en gros depuis A tombeau ouvert puis Gangs of New-York ) un film indigeste de Scorsese qui finalement ne fait que reproduire avec platitude et moultes clichés le schéma des Affranchis. Enlevez l'univers des indiens du vingtième siècle naissant, mettez des mafiosis avec De Niro en Parrain grimaçant et Leonardo Di Caprio campant Ray Liotta en fils spirituel qui finit par trahir pour sauver sa tête. Et nous y voilà...

vendredi 19 avril 2024

It Follows


La dernière image ? La vie dans l'habitacle traversant des quartiers comme on en trouve à Haddonfield  dans Halloween. On the Road. L'esprit du road movie. La beat Generation version série B. J'aime beaucoup ces désamorçages, ces respirations dans le film. La  bande de copains soudée (esprit Breakfast Club) dans la voiture et qui file vers son destin. La musique est également raccord, envoûtante mais inquiétante. Toujours ! 

Dans l'ensemble, je trouve l'idée d'It Follows intéressante surtout pour son esprit Sundance, très film indépendant américain qui viendrait se télescoper avec le genre matriciel horrifique (l'une des références centrales qui apparaît rapidement est The Entity aka Emprise de Sidney J Furie).

Côté genre précisément, je salue la séquence d'introduction (d'exposition) plutôt réussie. Car elle installe bien la peur et démontre l'horreur qui peut se faire jour et découler de ces rencontres "post coïtum animal triste".     

Ce qui me laisse perplexe c'est d'abord cette idée que le mal se transmettrait sexuellement. Point de départ pas inintéressant mais sous exploitée à mon sens ou alors aurait-il fallu jouer davantage la carte du second degré. Certes, on comprend bien les intentions au coeur des références, des Griffes de la nuit à Carrie en passant par Halloween... Tant que tu es "vierge"  tu ne risques rien nous murmurent ces oeuvres. Dès que les premières règles et l'âge adulte arrivent (Carrie) le péché est en toi... Métaphore éternelle des métamorphoses adolescentes qui font le deuil de l'enfant que nous fumes. Mais cela doit justement fonctionner comme métaphore et pas comme pillier narratif de l'intrigue. Ca crée une confusion malvenue : Pour me sauver, je vais devoir refiler ma maladie "honteuse" à ces petits cons sur un bateau là-bas... Ah bon ? Malsain oui. Sauf à manier l'outrance et l'ironie. Ce qui n'est jamais le cas ici. Première grosse faute de goût à mes yeux.

Par ailleurs, cette idée d'une entité qui vous poursuit quelle que soit sa nature (surnaturel, SF...) est divinement traitée dans Terminator (c'est un peu une Sarah Connor cette héroïne) ou dans Les Griffes de la Nuit : Ne t'endors pas sinon Freddy Krueger viendra te chercher... Voire dans Halloween Michael Myers est précisément décrit comme un fantôme à chaque coin de rue et qui pourrait bien (au moins au début) n'exister que dans la tête de Laurie Strode. Je trouve que dans chacun de ces univers (même s'ils sont tous différents) on sent à chaque fois une volonté de maintenir une intensité et une cohérence, un jusqu'auboutisme qui force l'admiration et n'en rend que plus mémorable la traque infernale. Or ici, passée l'installation qui intrigue, la deuxième partie, en gros à partir de la séquence de la plage, bascule dans quelque chose de différent, dans des univers qui finissent par affadir le propos et surtout faire perdre en crédibilité le postulat de départ. Ca tatônne, ça finit par "se chercher" quelque part entre Le sixième sens (elle est d'abord la seule à voir arriver ces Candyman aussi dérangeants qu'un moustique au moment de s'endormir), Ring (la malédiction vient sur toi parce que tu as regardé la cassette maudite) voire L'homme invisible (les autres ne voient pas l'entité mais voient les objets bouger autour etc). Gloubiboulguesque !

Si on rajoute l'idée farfelue que ces esprits ne feraient que marcher (ah bon ? wtf ?) comme dans un bon vieux film de Zombie, arpentant bêtement le macadam sans jamais pouvoir traverser les murs ni se téléporter... On se dit que trop c'est trop. Quant à la séquence finale dans la piscine, elle n'arrange pas les choses (revoir l'incroyable séquence de piscine de Morse pour s'en convaincre). Tout y devient premier degré, l'entité peut être éliminée, électrocutée, transpercée, recouverte avec un drap, ligotée, noyée, rasée, enduite de goudrons et de plumes... Du grand guignol ! Ce dérapage a commencé sur la plage où tous voient bien les cheveux de l'héroïne se dresser tout seuls sur sa tête... Elle s'enfile ensuite un champ de maïs, s'évanouit. Mais l'entité, elle, se sera perdue en route... Entre cette séquence et celle de l'hôpital, personne n'aura rien filmé, personne n'aura essayé de contacter les parents ou de se rendre à la police pour leur expliquer les choses forts d'un discours collectif convaincant et d'indices qu'ils ont pu réunir après la rencontre avec la victime "n-1". Bref, dès lors, dans un tel contexte, ça ne fonctionne plus. On n'y croit plus.

Voilà pourquoi je retiens de ce film le style, l'image, l'élégance, l'ambiance. Pour le renouvellement d'un genre, on repassera. Beaucoup trop de références qui partent dans tous les sens et mal digérées donc mal restituées.

jeudi 18 avril 2024

Le mal n'existe pas

La dernière image ? Cette séquence de fin déchirante dans une brume matinale dirait-on... Une rêverie de crépuscule ou de petit matin. Qui sait ?

Un film vraiment étrange mais pénétrant. Qui laisse des marques profondes, tout en ruptures, très personnel, entre transe musicale vivante, aérienne propre à la projection mentale et une réalité crue se déployant lentement dans un cadre (celui de la caméra) statique, empesé.

En cela, le film restitue parfaitement le mystère de la nature immuable, insondable qui toujours nous met au défi d'exister, nous incite au travail respectueux, harmonieusement. Un labeur qui nous donne l'illusion d'une solidité, d'une permanence, qui ne sont jamais qu'illusion. La vérité se niche dans les basculements imprévisibles de la vie comme l'épilogue nous en réseve et qui soudain vous ramène à beaucoup beaucoup d'incompréhension et d'humilité.

S'ajoute à ces sensations une réflexion fine et palpable sur le temps qui s'écoule différemment qu'on soit à la ville ou aux champs. Interminable d'un côté campagne, presqu'immobile. Et de l'autre, liquide, mouvant, d'un bureau à un habitacle, d'une visioconférence à une visioconference... Une affaire de sablier, d'argent qui brûle les doigts, de perte de sens...  

je tiens à souligner l'habileté de la mise en scène qui parvient à surprendre au moment de l'épilogue pour ce  qui est une réflexion pleine d'émotion sur la fragilité de nos vies. Une surprise qui devient désarroi, désespoir, face auxquels la placidité apparente du héros laisse admiratif, sans voix. 

Reste une fin ouverte qui peut décevoir dès lors qu'on s'est attaché à tous ces personnages jusqu'au maire de cette petite bourgade. Et que l'on espérait légitimement peut être comprendre ou juste savoir... Parce que l'énigme de cette installation finale laisse un peu sur sa faim : Voit-on vraiment ce qu'on nous donne à voir ? Qu'adviendra-t-il par la suite ? On veut savoir. On a trop aimé vivre aux côtés de ces personnages tous vrais et attachants pour des raisons chaque fois différentes.

Compte tenu de la multiplicité des points de vue revendiquée (depuis le regard abstrait d'un wasabi sauvage jusqu'à la caméra arrière d'un SUV en passant par le prologue vécu à travers les yeux et l'imagniation de la jeune Hanna) on peut tout à fait imaginer que cette séquence de fin soit la projection mentale d'un des personnages. Oui mais lequel ? Tout ici est affaire de "moment présent", dès que le temps s'accélère, que l'anticipation se fait jour, que l'on imagine ce qui viendra, alors le pire peut arriver... La peur engendrerait l'hésitation, l'hésitation engendrerait la réalisation de toutes nos peurs. Ici le projet du Gampling et sa malhonnêteté assumée pour des raisons bassement matérielles  peut mettre en péril touts les équilibres dans ce coin de paradis. Par ailleurs, un simple cerf blessé par une balle perdue peut injustement provoquer la mort de l'innocence. Le fameux battement d'ailes du papillon...

L'épilogue est là pour rappeler "how fragile we are"... Chaque être, chaque instant, chaque inspiration, chaque gorgée, le miracle de cette eau au fond de la vallée qui ne tient à rien... Nous sommes prévenus !

mardi 2 avril 2024

Oppenheimer

La dernière image ? Le grand silence pendant ce premier essai terrifiant, aveuglant. Toujours facile mais efficace. Forcément. Un tel moment laisse sans voix, sans yeux, sans ouïe... Un silence de mort.

Sinon quoi ? Pour moi, un biopic absolument quelcconque, très années 90, c'est à dire clinquant, nerveux, ampoulé, dans le plus pur esprit Oliver Stone des mauvais jours depuis les Doors jusqu'à JFk en passant par Nixon. je veux dire qu'on ne sent aucun véritable point de vue, pas de vision particulière. Ni à charge ni vraiment hagiographique quoi que... Juste une galerie de beaux portraits de papier glacé avec des personnalités historiques remarquables (waow, on en est baba) qui affleurent derrière le maquillage d'acteurs ultra connus sur un rythme soutenu de blockbuster sans âme émaillé d'allers retours temporels... Fatigant exercice qui en outre est interminable : 3 heures pour en conclure quoi au juste ? Que ce monsieur aurait trahi ses penchants et idéaux de gauche (ce qui pourrait d'ailleurs le perdre) pour fabriquer la plus terrible arme létale... Il s'en repent mais justifie l'horreur par le fait que l'Allemagne devait être empêchée d'aller plus vite que les Ricains sur le sujet. What else ? Il y a tellement de Biopics passionnants à créer. Qu'est-on allé chercher dans cet Oppenheimer sans grande aspérité : il aime les femmes, il a des idéaux, il sait aussi louvoyer et pactiser avec les grands de ce monde... Le génie au service du mal aurait des remords ? 

Mais le pire dans tout ça ? La musique non stop pour tout et pour rien. Avec des effets visuels et sonores vraiment datés pour suggérer que dans la tête d'Oppenheimer c'est vraiment le Bin'z ! Quelle fantastique audace !

A oublier bien vite. De Nolan, je reste sur Le Prestige ou Dunkerque, voire Memento. Pour le reste... 

dimanche 31 mars 2024

Ad Astra


La dernière image ? Probablement ces "salons de détente" spatiaux qui en convoquant des lieux terrestres vivants et colorés me rappellent certaines séquences magiques de Soleil Vert (Richard Fleisher).

C'est curieux mais le début comme la fin et le retour sur Terre me rappellent Gravity. Le coeur du film me rappelle davantage le côté pseudo philosophique de Interstellar. Et la voix off lancinate elle évoque le  Terence Malick dans des films comme Tree of Life ou La ligne rouge. Donc déjà une impression de déjà vu et de manque de caractère, de personnalité peut-être.

Sur le positif, j'aime bien le rythme lancinant, le côté désincarné, ce cinéma intérieur qui résonne dans le vide intersidéral. On sent l'hommage sincère au Kubrick de 2001.

Sur le négatif, le coeur de ce que je ne digère pas c'est cette voix off qui paraphrase tout... C'est fatigant de faire dire à un personnage qu'il a peur d'affronter son père quand son regard et son attitude suffisent à le dire. Voire même la situation qui en soi a de quoi inquiéter... 

Même les dialogues comme celui du père et du fils sont lourdingues. Lourdingues par ce qu'ils font dire aux personnages ("Papa, viens... Non mon fils Laisse moi partir") mais aussi par le maniement à outrance de gros symboles psychanalytiques... Le fils doit tuer le père (le dépasser, le supplanter) pour se libérer... Et tout arrive tranquillement aux confins de la galaxie avec pour enjeu de sauver l'humanité. Rien que ça !

D'ailleurs on peut finalement résumer le film comme une sorte d'Apocalypse Now du trou noir. Le père incarmant ce Capitaine Kurtz devenu zinzin. Et Willard/Sheen alias Pitt serait son fiston chargé de le "débrancher" ou de le ramener... Donc rien de bien neuf sous le soleil exactement.

Par ailleurs toute la sphère "anticipation" résumée par l'attaque de "pirates" sur la surface de la Lune dysfonctionne et me rappelle vraiment du mauvais Nolan (Inception ou Tenet). 

En revanche j'ai adoré le segment autour des singes de laboratoire. Puissant passage.

Le film est donc inégal, globalement un peu plan plan. Assez ampoulé. Bavard malgré l'économie recherchée (personne ne vous entendrait crier mais tout le monde vous entend penser). Mais bon James Gray a quand même du talent et Ad Astra vaut déjà mieux que Interstellar par exemple.

Rubber


La dernière image ? Ces hommages sans détour, rigolos mais inoffensifs, à Scanner, Duel ou Zombie... Toute l'histoire du Club Video de nos jeunes années est convoquée en quelques plans sympathiques.

Je suis dans ma période Quentin Dupieux et j'ai beau avoir de la tendresse pour Le Daim ou Au Poste, j'avoue avoir été passablement déçu par Yannick et pour Rubber, la déception esst encore plus grande.

Comme souvent, il y a un point de départ absurde qui force l'admiration. C'est certain. On se dit qu'en déroulant ce fil, on ne peut que déboucher sur des moments d'anthologie. Le problème est hélas multiple.

D'abord avec cette ambition, il faut pouvoir faire peur, créer de la tension. Mais 1 l'humour désarmorce absolument tout et surtout 2 n'est pas Carpenter, Cronenberg ou Spielberg qui veut.

On dit souvent que l'amour est une affaire sérieuse... C'est un peu ce que je ressens ici... Le genre autorise bien sûr le second degré (Sam Raimi ou Wes Craven mais d'autres n'en manquent pas pour ne prendre que ces deux exemples) mais le genre matriciel tout puissant doit remplir son office, doit nous emmener quelque part et très loin... Une immersion, un voyage sans retour qui permet des réflexions profondes sur la vie, la mort le sens de ce qui nous arrive.

Et Rubber hélas n'en reste qu'au film sketch, potache. C'est rageant, on ne croit d'ailleurs guère à ce pneu revenu à la vie, capable de se dresser tout seul, doté d'une pensée qui peut tuer... On ne croit à rien.  Et tous les blas blas autour du "no reason" (justifier l'absurde par une séquence d'intro, bof bof, dépeindre un meta public comme un groupe de touristes dans un parc pneunimalier, bof bof) ne font qu'agacer encore plus... Ce qui rend le film (pourtant court) interminable avec une répétition épuisante des mêmes têtes qui explosent comme chez Cronenberg...

C'est donc ça le pire, c'est que Rubber ne cherche même pas du côté de l'hommage sincère, de l'émotion qu'ont suscité chez nous toutes ces formidables pépites de la fantastique ère Video. Il ne fait que pasticher, un petit sourire cynique au coin des lèvres. C'est vraiment dommage. Ce cinéma là en a sauvé des vies entières, il mérite mieux.

samedi 30 mars 2024

Copenhagen Cowboy


La dernère image ? Innombrables... NWR est un génie visuel. Ces mouvements rotatifs incessants donnent le tournis. L'image hypnotique est aussi sublime que l'univers est macabre. Des extraterrestres y côtoient des vampires de la haute et des parrains de la mafia, qu'elle soit chinoise ou serbe.

Je ne sais pas être objectif avec ce réalisateur qui sait créer des formes qui n'appartiennent qu'à lui.

Maintenant il faut être honnête. Cette fois il y a des choses qui ne fonctionnent pas. Les combats notamment pour ce petit bout de femme sont terriblement moches et mal chorégraphiés. Il aurait fallu lui trouver d'autres moyens de supprimer ses adversaires. La posture karateka a quelque chose de risible. On n'y croit pas. Tout simplement.

Et puis ce dernier épisode offre un final pas abouti, beaucoup trop ouvert, presque ridicule avec ces femmes extraterrestres qui se retrouvent toutes dans la forêt avec la même tenue... On sent qu'il essayer de nous vendre un futur hypothétoque avec affrontements d''entités maléfiques aux pouvoirs sans limites.   

Comme toujours avec Winding Refn, il reste ici des moments sublimes qui parviennent l'air de rien à faire se rencontrer l'univers mental glacé de Neon Demon ou Only God Forgives voire celui de Too Old To Die Young et celui ancré, enraciné de la trilogie Pusher des quartiers populaires de Copanhague. Je pense surtout à l'épisode 1, à ce point de départ aussi "réaliste" qu'étouffant. Mais cette fois je confesse être resté sur ma faim, surtout à cause du dernier épisode, surtout si jamais aucune suite ne vient prolonger cet élan. Et puis parce que je déplore cette faute de goût d'avoir cédé à la tentation de rendre crédible les combats de cette petite puce contre des géants de la cruauté.

Mais comme à chaque fois, on retiendra qu'il y a plus de cinéma ici que dans 99,9% des séries TV qui sortent tous les jours comme des produits manufacturés sans âme et qui oublient que le cinéma c'est la science du "shot" comme langage, pas de l'exposition d'une ligne de scénario. Le cinéma est trascendance. Et celui de NWR nous le fait si bien ressentir.

Yannick. Trop peu à donner...

La dernière image ? La montée en pression de Pio Marmaï pour ce qui restera comme sa plus belle prestation du film, la plus habitée. Il en récolte d'ailleurs des applaudissements.

Sinon Yannick est un film hélas en roue libre qui comme souvent lorsqu'un film démarre sur une bonne idée ne vous emmène pas très loin dès lors que l'idée reste larvée, sous-exploitée.

Je pense évidemment à La Venus à la fourrure, la sublime réflexion de Polanski sur le cinéma, le théâtre et la création qui avait tant à offrir. Or ici, le prétexte est à faire sourire au mieux. Raphaël Quenard apporte il est vrai quelque chose d'attachant au personnage, une certaine profondeur,  mais cela ne suffit pas dès lors qu'on en reste à une mise en joue, une tentative d'écrire un pseudo sketch sans intérêt. Et d'ailleurs, le film se piège un peu lui-même puisqu'il accrédite d'entrée le fait que cette pièce que nous découvrons est toute pourrie et que ce qui va la remplacer ne vaut pas tellement mieux... Quel intérêt dès lors ? Yannick est sympathique, attachant, mais fort oubliable.

dimanche 17 mars 2024

Le règne animal


 La dernière image ? J'adore ce moment où le Papa attend son fils avec l'envie d'avoir une explication. Il a découvert le pot aux roses, lui court après, le ratrappe, ensemble ils tombent au sol, Papa étreint son fiston et le rassure.. Très beau moment  et il y en a d'autres du même tonneau. Dans l'ensemble, la relation père-fils avec la figure absente de la mère (deuil métaphorique et réel à la fois qu'il faut traverser ensemble) est touchante, va droit au coeur. Ceci est rendu possible grâce à ce jeune acteur Paul Kircher vraiment doué. Romain Duris est bien aussi mais on l'a déjà vu comme ça, nerveux, jouant la carte de l'humour (ses rires à la ronde, ses cris dans la nuit) teinté d'une forme de désespoir.      

Pour cette relation et l'univers toujours cinégénique des merveilleuses Landes, le film (j'avais déjà aimé Les Combattants) vaut le détour.

Maintenant si l'on creuse un peu... J'ai quelques griefs malgré la sympathie générale que m'inspirent ce réalisateur et son film.

Commençons par la fin. Je n'ai pas été convaincu par cet épilogue. Le papa est enfin résolu à laisser son fiston voler de ses propres ailes. So what ? Il va s'installer à 800 mètres dans un nid maousse créé par un homme oiseau ?  Mais rien n'est réglé ! D'abord son fils est-il vraiment d'accord ? Peut-être pas... Lui a-t-il vraiment demandé son avis ? Pas vraiment. Toute leur relation parle justement de cette ill communication, de l'humilité du rôle de parent. Ensuite on imagine bien dans la droite lignée des premiers "ratissages" en régle effectués par la police quelques temps plus tôt que le fiston finira bientôt atrappé voire pire... tué ? Si une fois sa transformation achevée on le trouvait par exemple à tourner autour de quelques poulaillers du côté de Lit-et-mixe. D'ailleurs voilà une question jamais abordée : Qu'est-ce qu'ils mangeront ? S'entredévoreront-ils ? La chaîne alimentaire se remet-elle en place ?

C'est le deuxième point qui pose problème : ces créatures sont vécues comme fondamentalement humaines et qui le restent par delà leurs mutations. Comme ayant, comme gardant des notions du bien et du mal... Elles ne font du mal que parce que l'homme est méchant (la blessure involontaire infligée à un camarade vicieux qui manie les ultra sons comme d'autres la trique). Cet angélisme est agaçant. Les animaux sont par principe sympas, semblent vivre en communauté, en toute quiétude... Le problème ce ne serait pas eux ce seraient les hommes nous dit-on entre les lignes... On rejoue en cela toute la cosmologie des super-héros (tant de films déjà sur le sujet des mutants) qui sont vécus comme différents et haïs par le genre humain donc obligés de vivre cachés etc. Je pense aussi à La forme de l'eau qui abordait avec la même ambition le sujet de la différence, de l'exclusion, des appétits aiguisés de quelques puissants ici ou là pour cette chose déviante et ses potentialités sur un plan commercial...  

J'ajoute sur le genre qu'il y a des précédents... Evidemment Manimal dans les années 80 mais plus près de nous la série Sweet Tooth. Et ça me fait penser justement que ce film m'évoque finalement plus le pilote d'une série qu'un véritable long métrage. D'abord parce que cette fin comme je le disais reste assez ouverte. Ensuite parce qu'un personnage comme la fliquette ne mène (en l'état) nulle part. Une fausse piste qui nous laisse penser qu'elle peut mener quelque part et puis rien... Evidemment enfin l'absence d'explication sur ce phénomène laisse légitimement à penser que peut-être nous sera révélé un jour la façon dont tout ceci a commencé... Voilà donc un pilote sympa d'une série qui pourrait être une Sweet Tooth à la française, à la Landaise.   

Pour finir et c'est peut-être ce qui me gène le plus le film s'empare d'un genre (le fantastique) pour filer une métaphore somme toute classique sur des thématiques éternelles. Comme d'un prétexte en somme.  L'absence de la mère, de son corps rappelle ces deuils impossibles à faire lorsqu'un proche est porté disparu mais dont on ne sait dire avec certitude s'il est encore de ce monde ou pas. Par ailleurs ces métamorphoses chez le fiston sont évidemment le reflet direct de ces tranformations adolescentes (croissance, poils qui poussent, dents de lait qui tombent, désir physique qui s'éveille). Leur rapport toujours juste à la cruauté (entre eux, concurrence en jeu en vue des premiers émois) à la mort (celle de l'enfant qu'ils ont été). La scène de la découverte des dents rappelle par exemple la fameuse confrontation où le parent demande des explications à l'enfant après avoir découvert que ce dernier fume... La séparation finale évoque le départ de l'enfant du foyer familial.  Un deuil parmi d'autres. Bref je regrette pour ces raisons un matériau finalement un peu trivial et un genre utilisé comme pretexte.

Mais je garde au film ma sympathie pour sa poésie, son couple père fils un peu perdu mais si touchant. Par les temps qui courent, un film qui fait du bien. 

The Last of us

La dernière image ? Vraisemblablement celle qui secoue le plus... La perte de son enfant pour le héros masculin à l'issue du segment introductif de la série. Cela témoigne aussi d'un volonté de créer des personnages, en chair et en os, avec leurs traumatismes, leur sens de l'humour aussi (la jeune femme qu'on doit sauver à tout prix est à cet effet intéressante, beeaucoup de dérision propre à son âge et quelques mystères aussi).

A vrai dire, le premier épiode de cette saison 1 est appétissant. Il fonctionne. Probablement que le deuxième épisode, passe encore.  Mais dès le 3ème puis le 4ème, l'indigence est absolument partout. Une épidémie. Cela ramène à la difficulté d'écrire avec honnêteté et passion sur un sujet vu et revu, qui plus est en repartant de la matière d'un jeu video, sans tomber dans des clichés grossiers. La facilité en de pareilles extrêmités c'est ce qu'on s'autorise le plus directement.

Côté narration et même si je défends l'épisode 1 on ne pourra pas ne pas relever que ces intros chocs ont déjà été explorées maintes fois d'abord dans le génial L'Armée des Morts (Zack Snyder) quand le fantastique s'invite dans le réel le plus trivial. Et je crois même me rappeler que dans le poussif Walking Dead il en va aussi d'un premier plan qui voit un enfant (même zombie) mourir exécuté et une histoire de deux frères "cowboys" déjà... Donc à part cette histoire de "champignon", d'originalité fondamentale, on ne trouvera guère par ici.

Le principal problème qui surgit à l'épisode 3 c'est ce tunnel, cet interminable flash back pour conter par le menu l' "attendrissement" d'un survivaliste chevronné dès l'irruption d'un beau mâle blanc dans son horizon et la révélation que tous deux étaient destinés à vivre ensemble... les deux beaux au bois dormants retranchés dans leur résidence surprotégée. C'est non seulement dans un contexte d'apocalypse risible, pas crédible, mais on sent également beaucoup trop les clichés de scénaristes désireux d'expliquer, d'expliquer... Ainsi quand les 2 héros arrivent en fin d'épisode 3, il n'y a plus qu'à dérouler le programme.

Même combat avec l'introduction des deux frères noirs à la fin de l'épisode 4. Et que dire des retournements de situation de l'épisode 5 et ces zombies sortis de nulle part pour empêcher l'un des héros d'être exécuté manu militari ??? Non décidément quand ça veut pas, ça veut pas... La grande série "Zombiesque" on l'attend encore.         

   

dimanche 3 mars 2024

Onimusha


La dernière image ? Ces parents privés de vie (et de tête) par le héros (Toshiro Mifune revit littéralement) sous les yeux de leur propre fille. Quelques images comme celle-ci sont très marquantes dans cette adaptation animée d'un jeu video que je ne connaissais pas.

L'ensemble est assez vu et revu (le gant façon anneau du Seigneur des A. qui corrompt l'âme du héros) mais sont à saluer des moments forts (tous les affrontements titanesques) dans le village au début, autour de la falaise puis lors des séquences caverneuses et minières de la toute fin. L'équipe de héros (et d'anti-héros) est également plutôt sympathique et même attachante (rappelant en cela l'équipée d'un Apocalypse Now le long du fleuve ménageant avec parcimonie ses dangers mortels). Je le mets dans la mouvance d'un Blue Eye Samouraï, certes moins réaliste et beaucoup plus "défouloir" dans un esprit "je dégomme tout", avec les mêmes moments inégaux. Mais je confesse être allé jusqu'au bout de cette saison parce qu'Onimusha se laisse vraiment regarder sans déplaisir. 


jeudi 29 février 2024

Anatomie d'une chute

La dernière image ? Probablement ce moment père-fils dans la voiture qui dit les choses (la voix du fils sur les lèvres du père), le non-dit, la culpabilité du père, ses envies secrètes peut-être, tout ce moment émeut sincèrement. Beau passage, comme la longue séquence de dispute est également à saluer.

Le film dans l'ensemble est de bonne facture. Il est bien construit, bien joué, porté surtout par une actrice fantastique. Mais cela méritait-il une Palme d'Or ? Autant de prix reçus ici et là ? Je ne pense pas.

Ce que je peux regretter ou déplorer d'abord c'est le travail sur l'image. Une image fade, un manque objectif d'ambition sur le plan esthétique, servie par une mise en scène statique. On sent que la réalisatrice s'appuie beaucoup sur le dispositif texte / acteurs. Le cinéma c'est aussi de la mise en scène. C'est une ambition formelle malheureusement absente ici, deux séquences mises à part via le flash-back narratif (la dispute et le tête à tête dans la voiture). Pour ne reprendre qu'un exemple, Shining est immense pour tout ce qu'il met en branle sur le plan de l'utilisation des lieux, de la steadycam, des plongées, de la structure en chapitres, de la musique, d'un cinéma mental (le labyrinthe comme circonvolution du cerveau d'un écrivain s'écrivant à l'écran, y projetant ses propres culpabilités surgies du passé) qui exulte, émerge d'un fonds et d'une forme. On notera d'ailleurs que le scénariste ici emprunte allègrement le postulat de départ du roman de King (l'enfant "pas normal" en raison d'un traumatisme issu du passé et dont le père se sentirait coupable. Un père qui cherche à retrouver l'inspiration comme écrivain dans un cirque enneigé, la solitude disséquée de ces 3 personnages...).      

Je regrette par ailleurs le manque de nuances sur la psychologie de certains personnages. L'avocat forcément sympathique, intelligent, séduisant. Amoureux même. L'adversaire à la cour, franchement agaçant, antipathique. Tous les experts à charge ou décharge sont aussi à l'avenant, très voire trop caricaturaux. et puis au final cette femme accusée à tort et dont tout finit par démontrer l'honnêteté, les valeurs morales le courage quand on finit par se convaincre que le problème venait plutôt du côté du mari dépressif.... Un homme défaillant parmi tant d'autres.

Enfin et c'est peut-être le plus regrettable : ce couple revient dit-on sur les terres du mari. Soit, mais de voisinage, d'amis d'enfance, rien... Pas même de "qu'en dira-t-on ?" au village tout proche où l'on fait ses courses. Pas de parents d'élèves pour témoigner, pas de copains du fils, Pas de collègues profs du père ? Non, juste un vague psy qui viendra témoigner. C'est maigre. Je veux dire que cette situation de deux "créateurs" manifestement à l'aise materiellement (il faut pouvoir nourrir un aussi gros chien) chacun avec ses petites ambitions d'écrire dans un lieu aussi lambda que ce chalet de montagne, c'est finalement pauvre, c'est faible, c'est bien trop léger. Comme les enjeux dérisoires : "Je veux du temps pour écrire... et ben vas-y qu'est-ce qui t'en empêche petit d'homme ?" Bourgeoisie quand tu nous tiens... Et les parents des deux côtés ? Et les frères, et les soeurs ? Rien non plus... C'est comme si ce monde clos se limitait au père, à la mère au fils, au chien, au chalet. Et pis voilà. Bien trop peu. Il aurait été tellement bien d'avoir droit au chapitre de l'enterrement pour scruter, comprendre les forces en présence, apréhender au plus près les deux familles, le climat, les reproches, les haines larvées, les voisins... Juste d'un mouvement de caméra ample mais au plus près. Silencieusement. 

Pour exister, un monde doit vivre, s'étendre, abattre ses propres murs, dépasser sa réalité, donner à voir par tous les moyens possibles imaginables autre chose que ce qui nous est dit ou seulement suggéré. Ces personnages même un an après de longues enquêtes n'existent au fond que par le truchement de la machine-justice, qu'en suivant scrupuleusement son fil vers un jugement qui tombera, prévisible.

Anatomie d'une chute (titre hideux en passant) n'est donc pas si mal, se révèle sérieux, sagement appliqué, plutôt bien joué (surtout l'actrice principale), mais sans grand génie, pâtissant d'une image quelconque, de personnages souvent lisses et d'une intrigue finalement binaire où il manque beaucoup de choses (d'ambiguité ?) pour être véritablement transporté... Peut-être y manque-t-il la folie et le vertige d'une chute, une vraie !